L’Eurocommunisme, c’est de l’Anticommunisme

Au IXe Congrès du Parti communiste d’Espagne, qui s’est tenu en avril 1978, les révisionnistes de Carrillo et de la Pasionaria ont déclaré que leur parti n’est plus un parti marxiste-léniniste. Au XVe Congrès du PCI, qui s’est réuni en avril 1979, les communistes italiens de Berlinguer effacent de leurs statuts l’exigence, pour les membres du parti, d’assimiler le marxisme-léninisme, d’en appliquer les enseignements. Enfin, au XXIII Congrès du PCF, en mai 1979, les dirigeants communistes français, avec Marchais, proposent de supprimer des documents de leur parti toute référence au marxisme-léninisme. C’est ainsi que fut instauré dans les PC occidentaux ce que l’on appelle l’Eurocommunisme.

Dans le contexte de crise économique et sociale qui secouait l’Europe des années 70, selon Hoxha, rien ne peut mieux aider le système en place à se maintenir que ces courants qu’il décrit comme non-violents, capitulards et collaborationnistes.

Selon l’auteur, ce processus de remise en cause du marxisme-léninisme doit être analysé dialectiquement. Ce n’est pas un phénomène qui serait apparu par hasard à la fin des années 70. Il s’agit de la continuation, de la suite logique, d’un processus de remise en cause du socialisme depuis le Rapport Khrouchtchev au XX Congrès du PCUS tenue en 1956. Depuis cette date, les partis communistes d’occident se sont unis à la campagne anti-Staline réalisée par les khrouchtcheviens. Une campagne qui aurait comme objectif au fond, de remettre en cause, sans le dire ouvertement, le Socialisme en pratique.

Selon l’auteur, si le Lénine n’a pas été frappé dès le début, si les différents PC ont d’abord concentré leur feu contre Staline, c’était pour des raisons avant tout tactiques. Il faudrait s’attaquer en premier lieu au socialisme réalisé en Union soviétique, frapper d’abord le marxisme-léninisme là où il avait été mis en pratique.

Par leur attaque contre Staline, ils chercheraient à frapper en premier lieu la théorie et la pratique de la construction du socialisme pour, ensuite, par leur attaque contre Léninesaper la théorie et la pratique de la révolution prolétarienne telle qu’elle est posée par le Socialisme Scientifique.

La bourgeoisie a toujours eu à ses côtés, suivant les époques, des opportunistes, des renégats, comme disait Lénine. Des gens qui ont tous prédit la fin du marxisme, qu’ils considéraient comme inapproprié aux supposés temps nouveaux, à remplacer par leurs nouvelles idées bien plus «modernes». Des gens tels que Bernstein, Kautsky… et désormais ces messieurs eurocommunistes.  Leurs sermons n’auraient servi, selon Hoxha, qu’à freiner et à saboter la révolution, à mettre des bâtons dans les roues du prolétariat en lutte.

Chacun recyclerait les idées déjà défenestrées des précédents traîtres opportunistes. Des idées et théories “nouvelles” qui nous permettraient de passer au socialisme tous ensemble, prolétaires et bourgeois, sans lutte de classes, sans révolution, sans dictature du prolétariat, en respectant gentiment la légalité en place ; les eurocommunistes n’inventent rien.

L’eurocommunisme est pour Hoxha une théorie très similaire à la social-démocratie classique. On y retrouve le renoncement à la révolution socialiste, à la révolution violente pour transformer la société. Par ailleurs on y retrouve également l’idée comme quoi la lutte de classe dans les démocraties bourgeoises occidentales ne serait plus d’actualité, ou du moins le serait de façon différente par rapport à autrefois.

Pour eux, la conquête du socialisme se fera sur la base du travail parlementaire, du développement graduel des réformes et l’intégration progressive dans l’administration de l’Etat. Le Socialisme serait déjà quasiment là, il ne s’agirait plus que de le renforcer!

Ils respectent strictement la légalité bourgeoise et ne conçoivent pas le prolétariat comme étant la seule classe révolutionnaire jusqu’au bout et qui doit donc être hégémonique dans tout le processus. Ils tombent dans un interclassisme clair, répondant donc exclusivement aux intérêts de la bourgeoisie : ils participent au maintien du capitalisme. Ils sont à deux doigts de déclarer que la rupture entre sociaux-démocrates et communistes révolutionnaires était un fait regrettable qui aurait pu se dérouler autrement!

Ils prônent un socialisme démocratique (et Marchais parlait même de socialisme démocratique autogestionnaire, faisant référence à Tito). Pourquoi rajouter “démocratique”? Le socialisme réel, le socialisme scientifique, le marxisme-léninisme, est déjà démocratique : c’est la démocratie la plus haute pour les classes laborieuses et la dictature pour les anciennes classes dominantes. Pourquoi donc rajouter “démocratique”? Pour Enver Hoxha, cela ne peut signifier qu’une chose : faire que le socialisme devienne démocratique là où il ne l’était pas, vis-à-vis donc des anciennes classes dominantes. Il s’agit par conséquent de l’abandon de la dictature du prolétariat en faveur d’un régime hypothétique où bourgeoisie et prolétariat pourraient cohabiter paisiblement. Bref, pour l’auteur, en pratique, ça veut dire maintenir le système capitaliste en place et le prolétariat désarmé, sans défenses, face à la bourgeoisie. Cela revient à apporter en Europe Occidentale ce qui s’est passé au Chili avec Allende, ce qui ne serait pas vraiment la meilleure chose à faire.

Pour Hoxha, la vision des eurocommunistes de ce qu’est le Parti pose également problème. Ils le conçoivent non comme un parti cadre, avant-gardiste, une organisation regroupant les meilleurs éléments au sein des masses, mais comme un parti de masse dont l’activité se concentre sur la lutte parlementaire et économique, plongeant le parti dans le réformisme le plus total et absolu. Tout est sacrifié pour que puisse entrer le plus grand nombre de personnes possibles, comme par exemple au PCI de Berlinguer où ils disaient qu’ils acceptaient tout le monde indépendamment de leur courant de pensée.

Les PC d’Europe Occidentale, avec l’eurocommunisme et le long processus de remise en cause du marxisme-léninisme, ont laissé les dérives khrouchtchéviennes mais aussi internes les corrompre. Les corrompre à un tel point qu’ils sont devenus très exactement tout ce qu’ils avaient juré de combattre dans leurs respectifs congrès de fondations il y a maintenant 100 ans.

Les révisionnistes italiens sont même allés jusqu’à défendre la permanence de l’Italie dans l’OTAN afin d’essayer de tranquilliser les américains et leurs propres bourgeoisie nationale ! Ils étaient à deux doigts de parler de OTAN sociale !

Ceci nous fait malheureusement penser aux positions que porte encore actuellement le PCF concernant l’Union Européenne et leur idée d’une Europe Sociale, qui pourrait se mettre au service des travailleurs, comme ils l’exposent dans ce qui est leur programme « La France en Commun ».

Dans ce programme, ce que l’on observe, n’est que la maximisation, l’aboutissement, de ce qui est venue avec l’Eurocommunisme. Un programme social-démocrate plus modéré même que celui qu’avait la SFIO il y a 100 ans, quand les communistes s’en étaient séparé afin de former le PCF marxiste-léniniste et révolutionnaire des années 20, 30 et qui eu un rôle de premier ordre durant la Résistance.

Qu’auraient dit ces honorables révolutionnaires qui ont participé au Congrès de Tours en voyant ce programme? Qu’auraient-ils dit s’ils voyaient maintenant le Secrétaire Nationale du PCF, et candidat aux Présidentielles, Fabien Roussel, expliquer qu’un programme révolutionnaire désormais c’est ce que fait en matière économique Biden aux Etats-Unis? Que diraient-ils s’ils écoutaient les déclarations de Fabien Roussel concernant les kolkhozes (reprenant le bon vieux récit fantasmé de l’anticommunisme)?

Quand on voit ce qu’a été l’eurocommunisme, d’où il vient et vers où il a mené les différents PC occidentaux – le PCI s’est suicidé, le PCE en Espagne (qui ose se revendiquer à nouveau marxiste-léniniste depuis son dernier Congrès) qui collabore avec le gouvernement social-libéral actuel en Espagne, ou le PCF actuel qui est limite plus modéré que la SFIO de l’époque ou même la France Insoumise aujourd’hui – on peut se dire que l’affirmation d’Enver Hoxha comme quoi l’Eurocommunisme c’est de l’anticommunisme n’est pas vraiment une idiotie.

Pour Hoxha :

Les eurocommunistes ont jeté par-dessus bord le drapeau de la révolution. Le prolétariat, les opprimés et les exploités vont naturellement vers la révolution, vers la dictature du prolétariat et vers le socialisme. Naturellement aussi, ils recherchent la voie qui conduit à la satisfaction de ces aspirations historiques. Il appartient aux nouveaux partis communistes marxistes-léninistes de prendre en main la direction des batailles de classe, abandonnée par les eurocommunistes, afin de doter le prolétariat et les masses de l’avant-garde militante et combattante dont ils ont besoin.

Enver Hoxha, L’Eurocommunisme, c’est de l’anticommunisme.

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